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Redoubler d’efforts sur la transparence de la propriété effective grâce à la nouvelle Norme ITIE

Les exigences renforcées en matière de divulgation de la propriété effective aident les pays à faire face aux risques de corruption et à les atténuer.

Le secteur extractif ne cesse d’évoluer, et c’est également le cas de la Norme ITIE. Depuis son lancement en 2013, la Norme ITIE a été adaptée pour répondre aux risques émergents dans le secteur extractif. L’un des changements clés comprend des dispositions visant à intégrer la lutte contre la corruption dans la mise en œuvre de l’ITIE. La lutte contre la corruption est désormais devenue un objectif fondamental de certaines exigences spécifiques, notamment en matière de propriété effective.

Avec plus de 120 pays engagés en faveur de la transparence de la propriété effective, cette réforme est devenue une norme mondiale que les juridictions doivent adopter afin de s’aligner sur les principes internationaux de transparence et de redevabilité. Il est essentiel de connaître les personnes participant aux transactions commerciales entre les entreprises et les gouvernements, afin de préserver la réputation et de favoriser un climat de confiance. Cela permet de prendre des décisions éclairées sur les relations commerciales potentielles et constitue un outil important pour lutter contre la corruption.

La transition énergétique mondiale souligne la nécessité de cette réforme. Étant donné que l’évolution de la demande de pétrole, de gaz et de minéraux peut exacerber les risques de corruption dans le secteur extractif, il est d’autant plus crucial d’assurer une gouvernance transparente et responsable des ressources. Dans ce contexte, la transparence de la propriété effective joue un rôle central en garantissant que les profits dérivés des ressources naturelles profitent aux citoyens plutôt qu’aux intérêts particuliers de certaines personnes. L’utilisation de registres publics peut soutenir une multitude d’objectifs, notamment les enquêtes sur la corruption, le suivi des flux financiers, la prévention des conflits d’intérêts, la mise en lumière des irrégularités et l’amélioration de la diligence raisonnable et du contrôle des sanctions, entre autres objectifs.

Faire avancer la question de la propriété effective

Les exigences en matière de propriété effective ont considérablement évolué au cours de la dernière décennie. En 2013, la Norme ITIE recommandait aux pays d’établir des registres publics des entreprises. Trois ans plus tard, la Norme ITIE a introduit une exigence historique, rendant obligatoire la divulgation des bénéficiaires effectifs des entreprises pétrolières, gazières et minières à compter de janvier 2020. Suite à un projet pilote de petite envergure mené en 2013, plus de 30 pays de l’ITIE divulguent désormais des données sur la propriété effective, soit par le biais de registres, soit par le biais des Rapports de l’ITIE.

La Norme 2023 de l’ITIE va plus loin : les dispositions renforcées incluent des seuils plus bas pour la déclaration des données sur la propriété effective et aucun seuil pour les personnes politiquement exposées (PPE), des liens renforcés avec les octrois de licences, une meilleure surveillance de la propriété des entreprises d’État et des entreprises cotées en bourse, la déclaration de la propriété juridique et des chaînes de propriété, ainsi que l’utilisation par les entreprises des données sur la propriété effective à des fins de diligence raisonnable.

1. Abaissement des seuils de déclaration des bénéficiaires effectifs (2.5.f.ii)

Lorsqu’elles établissent la définition de la propriété effective, les juridictions précisent la participation minimale qu’une personne doit posséder ou contrôler dans une entreprise, par exemple la détention d’actions ou de droits de vote. Plus le seuil est bas, plus il est facile d’identifier des intérêts dissimulés. Reconnaissant que le secteur extractif est sujet aux risques de corruption, la Norme ITIE encourage désormais les pays à adopter un seuil de 10 % ou moins pour la divulgation de la propriété effective. Ce seuil garantit que la plupart ou la totalité des participations sont divulguées, ne laissant aucune place à des intérêts dissimulés.

Alors que les premiers pays à l’avoir adopté, comme le Royaume-Uni et l’Ukraine, ont établi un seuil de 25 % en 2015, des législations plus récentes dans l’ensemble des juridictions ont fixé des seuils plus bas. Aujourd’hui, plus de 20 pays de l’ITIE ont adopté un seuil de 10 % ou moins, dont l’Argentine (1 action ou plus), la Colombie (5 %), le Nigeria (5 %) et le Sénégal (2 %). De plus, un certain nombre de pays ont spécifiquement adopté des seuils plus bas pour les secteurs à haut risque tels que les industries extractives, notamment l’Arménie (10 % pour le secteur minier, contre 20 % pour les autres secteurs), le Ghana (5 % pour les entreprises du secteur extractif enregistrées au niveau local, contre 20 % pour les secteurs à faible risque) et le Liberia (5 % pour les secteurs minier, pétrolier, gazier et agricole, contre 10 % pour le secteur forestier). Pourtant, de nombreux pays n’ont pas encore suivi le mouvement.

2. Assurer la déclaration des PPE pour déceler les conflits d’intérêts (2.5.f.ii)

La Norme 2023 de l’ITIE a renforcé l’exigence de divulgation des PPE qui détiennent directement ou indirectement une participation dans une entreprise, en exigeant la divulgation complète des PPE, quel que soit leur niveau de participation.

Ces divulgations sont primordiales pour identifier les conflits d’intérêts. À l’inverse, un manque de transparence sur les PPE et leurs actifs – en particulier ceux détenus dans le secteur extractif – peut présenter des risques élevés de corruption, en particulier lorsque les PPE participent à l’attribution de concessions de ressources naturelles. Des pays comme l’Arménie, le Ghana ou la République kirghize exigent que les bénéficiaires effectifs qui sont des PPE divulguent leur propriété ou leur contrôle, quelle que soit la taille de la participation. Des initiatives telles que «Joining the dots » démontrent l’intérêt de l’utilisation de ces informations.

3. Lien avec le processus d’octroi de licences (2.2.c)

La Norme 2023 de l’ITIE renforce le lien entre les octrois de licences et les informations sur les bénéficiaires effectifs, contribuant ainsi à garantir que les licences sont accordées à des entités transparentes et responsables. Les pays de l’ITIE sont encouragés à relier les registres de licences accessibles au public aux plateformes gouvernementales contenant des informations sur les propriétaires juridiques et les bénéficiaires effectifs des entreprises pétrolières, gazières et minières.

Ce lien peut aider les régulateurs à établir qui se cache derrière les entités juridiques qui demandent, détiennent ou transfèrent des licences. Bien que peu de juridictions relient activement les informations sur les licences et les bénéficiaires effectifs, le programme Opening Extractives, mis en œuvre par l’ITIE et Open Ownership, aide des pays comme la Colombie, le Ghana, l’Indonésie et la Zambie à garantir que les données sur les bénéficiaires effectifs sont activement utilisées pour le contrôle des licences.

4. Divulgation du contrôle et de la propriété des entreprises d’État, de leurs fournisseurs et des entreprises cotées en bourse (2.5.f.iii, v et 2.6.e)

La Norme 2023 de l’ITIE exige désormais des entreprises d’État qu’elles divulguent le nom de l’État ou des États qui les possède(nt) ou les contrôle(nt), le niveau de propriété, ainsi que des détails sur la manière dont s’exerce la propriété ou le contrôle. Les entreprises d’État sont également encouragées à divulguer l’identité et les bénéficiaires effectifs de leurs agents ou intermédiaires, fournisseurs ou sous-traitants pour les transactions significatives, ce qui peut contribuer à fermer la porte à la corruption.

Les groupes multipartites de l’ITIE sont également encouragés à examiner l’exhaustivité et la fiabilité des données sur la propriété qui sont divulguées dans les dépôts boursiers. Cela peut contribuer à combler les lacunes dans certaines juridictions où les entreprises cotées en bourse pourraient tirer parti d’exigences de transparence laxistes.

5. Divulgation de la propriété juridique et des chaînes de propriété (2.5.g)   

Les pays mettant en œuvre l’ITIE sont désormais tenus de divulguer les propriétaires juridiques, tandis que les entreprises sont encouragées à divulguer leur structure de propriété, y compris la chaîne complète des personnes morales menant jusqu’au bénéficiaire effectif. Cela peut contribuer à cartographier l’ensemble des entreprises et des relations entre les personnes physiques et morales qui contrôlent, influencent ou possèdent une entreprise, ce qui peut orienter les enquêtes sur les conflits d’intérêts.

6. Utilisation de la propriété effective dans le cadre des processus de diligence raisonnable des entreprises (1.2.b)

Les entreprises soutenant l’ITIE et les entreprises déclarantes sont tenues de publier une politique anti-corruption stipulant la manière dont elles gèrent le risque de corruption, y compris leur utilisation des données sur la propriété effective. Ces informations peuvent aider le secteur privé à lutter activement contre les risques en identifiant les personnes avec lesquelles il fait affaire. 

Le point de discorde : les préoccupations liées à la confidentialité

Certains pays de l’ITIE demeurent réticents à divulguer publiquement les informations sur les bénéficiaires effectifs, invoquant des préoccupations liées à la confidentialité et à la protection des données à caractère personnel. Il demeure difficile de trouver un juste équilibre entre transparence et confidentialité.

Malgré un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui a décidé que l’accès du public aux registres de la propriété effective n’est plus valable dans tous les cas, plusieurs pays ont fait en sorte que leurs registres restent accessibles au public. Les pays concernés par cette décision devraient étudier plus avant les questions liées à ce qui constitue un intérêt légitime à accéder aux données sur la propriété effective, en particulier pour les propriétaires d’entreprises détenant ou demandant des licences extractives.

Pourtant, l’importance et la valeur de la divulgation publique de la propriété effective dans le secteur extractif sont évidentes. En fin de compte, les ressources naturelles appartiennent aux citoyens, et la transparence est essentielle pour garantir que ces ressources sont utilisées à leur profit. Les pays de l’ITIE doivent continuer à progresser dans la collecte et la divulgation des données sur la propriété effective, comme l’exige la Norme ITIE. Plusieurs pays ont montré leur engagement envers cet objectif en établissant des registres publics, notamment l’Arménie, le Ghana, l’Indonésie, le Liberia, le Nigeria, le Royaume-Uni et la Zambie. Même s’il reste encore beaucoup à faire pour garantir l’exhaustivité et la fiabilité des données, ces exemples démontrent que les avantages l’emportent sur les risques.

Aller de l’avant

Les dispositions de la Norme ITIE sur la transparence de la propriété effective, désormais une norme mondiale, renforcent l’engagement de l’ITIE à atténuer la corruption dans le secteur extractif. À l’ère de la transition énergétique, ces dispositions sont d’autant plus essentielles pour garantir des conditions de concurrence équitables et transparentes. L’ITIE reste déterminée à aider les pays mettant en œuvre l’ITIE à atteindre cet objectif, et les exigences en matière de transparence de la propriété effective témoignent de la position proactive de l’organisation pour faire avancer ce programme.

 

Ce blogue fait partie d’une série plus générale sur le thème de la lutte contre la corruption qui étudie plus en profondeur les changements apportés à la Norme ITIE. Pour en savoir plus.

    Author(s)
    Lucia Cirimello
    Photo attribution
    Stokkete / Shutterstock