Du haut de ses dix ans d'expérience, l'ITIE Niger est en mesure de proposer des réformes pour renforcer la responsabilité de la gouvernance du secteur extractif.
Alors que le Niger fait le bilan des dix ans de présence de l'ITIE dans le pays, il peut mesurer si celle-ci satisfait la demande d'informations du public. Plutôt que de rédiger des rapports ITIE de plus en plus longs, il peut être intéressant d'élargir les systèmes gouvernementaux pour s'assurer que les informations les plus demandées soient régulièrement mises à disposition.
Exploiter les réformes d'audit
En dix ans, l'ITIE Niger a déjà encouragé des réformes de finances publiques concrètes. Pourtant, il reste tant d'opportunités à explorer. Agissant sur l'une des mesures correctives de la procédure de validation du Niger conformément au Règlement de l'ITIE en 2010-2011, la Cour des Comptes (auditeur général) a initié les audits annuels de la collecte des recettes dans le secteur des industries extractives du gouvernement, avec des rapports publics disponibles pour les années 2010, 2011 et 2012.
Les audits comportaient des recommandations importantes, comme le besoin d'implémenter des numéros uniques d'identification fiscale pour toutes les sociétés de recouvrement, un contrôle plus strict des détenteurs de licences pour l'exploitation des mines et du pétrole et le besoin de réexaminer les exonérations fiscales pour les entreprises extractives, estimées à 140 milliards de francs CFA (233 millions de dollars des États-Unis), pour un total de recettes sur le secteur extractif d'environ 75 milliards de francs CFA (125 millions de dollars des États-Unis). Pourtant, seulement 9 % des recommandations du rapport 2010 ont été mises en œuvre à ce jour selon l'auditeur général.
Bien que les audits annuels de la Cour des Comptes doivent faire office de certification pour les publications ITIE du gouvernement, les derniers rapports ont été différés. La publication des rapports des audits 2013-2014 est toujours en attente. Bien qu'elle opère au niveau des normes internationales alignées sur l'INTOSAI, la Cour des Comptes manque encore de ressources, avec seulement trois employés travaillant sur les audits annuels pour les activités extractives. Lors du dernier examen des dépenses publiques et de la responsabilité financière (PEFA) du Niger par le FMI en 2013, la Cour des Comptes avait un bon classement sur la question de la ponctualité des audits, mais elle était moins bien positionnée en ce qui concernait la conformité aux normes des audits et à la robustesse des procédures. Le rapport ITIE 2012 du Niger est le dernier rapport audité par la Cour des Comptes à se baser les chiffres du gouvernement. Pourtant, la mise en place de l'ITIE dans le pays pourrait servir d'outil pour suivre les changements dans les pratiques des audits et les recommandations qui s'ensuivent, conformément à l'exigence 4.9.
Transferts infranationaux non acquittés
Il existe une forte demande de publication des transferts infranationaux relatifs aux redevances. La loi accorde aux gouvernements locaux des pays où se déroulent des activités extractives un revenu de 15 % de toutes les redevances minières et pétrolières (en plus d'autres revenus moindres). Bien que le trésorier du pays soit tenu de publier tous les ans une circulaire décrivant les écarts des transferts entre les gouvernements locaux, le ministre des Finances n'a pas émis de telle circulaire depuis 2013, ce qui a pour effet de suspendre les transferts infranationaux. Bien que les valeurs de ces transferts ne soient pas les plus importantes, elles représentent les dépenses les plus visibles pour les communautés locales au Niger, ainsi que pour beaucoup d'autres pays dans la région. Pourtant, il existe peu d'informations publiques sur les transferts infranationaux et sur les arriérés accumulés au cours des dernières années. Les rapports ITIE du Niger constituent un outil essentiel pour sensibiliser le public sur la façon dont ces transferts sont répartis et sur le suivi de ce que devrait percevoir chaque gouvernement, conformément à l'exigence 5.2.
Renforcer la traçabilité des versements
Les réformes sur les finances publiques du gouvernement offrent une opportunité pour intégrer les procédures de rapports ITIE dans les systèmes gouvernementaux. Le département fiscal du ministère des Finances travaille sur la numérisation de ses systèmes de perception des impôts et implémente dans le même temps les numéros uniques d'identification fiscale. L'extension à d'autres sociétés de recouvrement permettrait à la trésorerie de séparer les contribuables du secteur extractif des autres contribuables. Les dernières donnés fiscales publiques sont accessibles dans un délai d'environ 30 mois (les données d'août 2014 sont disponibles depuis février 2017), d'autres informations fiscales devraient donc se manifester en temps opportun.
La numérisation et les codes unifiés pour tous les contribuables, en plus de l'introduction d'une classification unifiée des revenus, devraient améliorer la traçabilité des versements des entreprises. Le Niger est déjà en train de générer des données lisibles par machine classées conformément au codage des statistiques des finances publiques (SFP) du FMI, accessibles sur la page ITIE du Niger. Le gouvernement pourrait s'appuyer sur cette classification des revenus pour mettre en œuvre des codes SFP uniques pour tous les revenus provenant des activités extractives.
Le casse-tête des cadastres
Les rapports ITIE et d'autres sources tierces limitées comme la Charte de l'énergie sont les seules sources d'informations accessibles au public sur les licences d'exploitation minière, pétrolière et gazière. Davantage pourrait être fait pour aligner ces documents avec la carte minière du Niger en cours d'élaboration, disponible sur le site du ministère des Mines et du Développement industriel. Une modernisation des cadastres miniers et pétroliers est en cours. En raison de la lenteur des réformes (il n'est pas précisé si les cadastres seront accessibles au public sur Internet), les rapports ITIE devraient servir d'outils pour établir un diagnostic annuel et collecter des données afin de combler les lacunes des registres actuels, conformément à l'exigence 2.3.
Source: Ministère des Mines, République du Niger
Appliquer la loi
Enfin, l'ITIE peut servir de canal pour garantir une meilleure mise en œuvre des lois déjà existantes. Certaines solutions sont à portée de main, comme les dispositions de la Constitution de 2010 (Article 150) qui demandent la publication des contrats portant sur les activités extractives. Bien que tous les contrats doivent être publiés dans le Journal Officiel, qui n'est pas accessible en ligne, seuls quelques-uns ont été rendus publics. L'ITIE pourrait offrir au Niger des moyens de pister les contrats qui n'ont pas encore été divulgués, conformément à l'exigence 2.4.
Après avoir posé les bases pour une divulgation transparente des revenus, le Niger entre maintenant dans une phase critique. Avec les plus grandes exigences des normes de l'ITIE en matière de transparence, l'objectif est de rendre les informations de l'ITIE accessibles pour répondre à la demande locale d'information. Tirant parti des structures disparates des rapports du gouvernement, y compris les annuaires statistiques annuels de 300 pages de l'Institut national de la statistique et son portail de données, le Niger a maintenant l'opportunité d'intégrer les rapports de l'ITIE dans les systèmes des gouvernements et des entreprises.
Pour plus d'informations sur les procédures ITIE au Niger, veuillez consulter la page du Niger sur eiti.org.