Aborder la question de l’exploitation minière à petite échelle en Éthiopie
Comment l’ITIE peut contribuer à identifier et relever les défis de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle
Manque de données, manque de supervision
Le manque d’informations et de compréhension quant à la portée et à la nature de l'activité artisanale fut l’un des principaux défis à relever afin d’améliorer la gouvernance du secteur. Collecter des informations détaillées et fiables sur l’échelle, les dynamiques et l’économie peut se révéler être difficile, et le peu de données disponibles est souvent mal stocké et rarement utilisé pour l’élaboration des politiques.
La vraie valeur de l’activité artisanale dans un pays a rarement été recueillie. Par le passé, le secteur n’a pas été couvert par le rapportage ITIE du fait que les paiements et les recettes du secteur étaient généralement faibles. Toutefois, l’ITIE demande à ce qu’une estimation de l’activité du secteur informel et sa contribution à l’économie soient divulgués. L’ITIE cherche de plus en plus à fournir une image plus complète de la contribution que toutes les activités du secteur minier apportent à l’économie. Certains pays tels que l’Afghanistan, la République centrafricaine, la Colombie, la RDC, le Ghana, le Liberia, Madagascar, le Mali, la Mongolie, le Niger, les Philippines, le Sénégal et le Togo ont publié des chiffres estimatifs ainsi que des informations sur le secteur n’ayant pas trait aux recettes, parmi lesquelles des détails sur le cadre juridique applicable, les taux fiscaux, l’octroi de licences, la production estimée et les chiffres sur les exportations. Jusqu’à présent, l’expérience suggère que l’inclusion de l'activité artisanale dans le processus ITIE a le potentiel pour améliorer la sensibilisation des citoyens sur les activités du secteur et certains des enjeux associés, et peut contribuer à avoir un débat fondé sur des données probantes sur les coûts et les bénéfices de l'activité artisanale.
Utiliser l’ITIE pour relever les défis de l’activité artisanale
Certains pays dans lesquels l'activité artisanale est très présente, notamment l’Éthiopie, la Tanzanie et la Zambie ont inclus des représentants du secteur de dans leurs groupes multipartites en tant que membres ou observateurs. Au Ghana, le Groupe multipartite est en pourparlers avec les représentants du secteur artisanal. Les exploitants à petite échelle au Ghana voient l’ITIE comme une opportunité d’œuvrer à la création de chances équitables entre les secteurs à grande échelle et artisanal, ainsi que comme une plateforme pour une meilleure visibilité ainsi qu’une meilleure compréhension du secteur. Selon les représentants, le rapportage ITIE peut également contribuer à apporter plus de clarté sur les dispositions fiscales et garantir l’uniformité des taux de d’impôts appliqués et des registres d’impôts versés.
Le rapportage ITIE peut fournir un aperçu de l’activité du secteur artisanal, sa production, ses données sur l’exportation et les recettes, ses données quantitatives sur le secteur, ses liens avec les sources d’informations existantes ainsi que la description d’initiatives en cours dans un pays afin de soutenir le développement de l'activité artisanale. En contribuant à fournir des informations plus complètes et plus fiables sur le secteur, l’ITIE a le potentiel d’aider le gouvernement à s’engager efficacement avec les parties prenantes nécessaires pour développer des politiques durables et améliorer la supervision du secteur par le gouvernement.
La quête de l’Éthiopie pour couvrir le secteur artisanal
L’Éthiopie est l’un des pays de l’ITIE qui déploie des efforts afin de formaliser le secteur artisanal en octroyant des licences à des exploitants individuels, en apportant un soutien technique pour le renforcement des capacités, en créant des infrastructures de bases et en facilitant une commercialisation formalisée de l’or. Par exemple, certaines lois relatives à l’ASM ont été mises en place afin de mieux gérer le secteur et la Banque nationale a mis en place un agent acheteur pour l’or dérivant d’exploitants à petite échelle.
En plus de fournir un aperçu du secteur dans son premier rapport, l’ITIE de l’Éthiopie a mené une étude axée sur l’ASM afin de mieux comprendre les principaux défis du secteur. Ce rapport spécial vise à analyser les différents aspects des opérations de l’ASM en Éthiopie, sa valeur économique, sa contribution sociale et ses impacts en étudiant la chaîne de valeur de l’ASM. Il présente des informations clés importantes sur la chaîne de valeur de l’ASM (du cadre juridique et l’octroi de licences, aux estimations de production, recettes et contribution économique) et comprenait les résultats clés suivants :
1. Plus de personnes par rapport à ce que l’on avait estimé auparavant sont susceptibles d’être impliquées dans des activités artisanales. Le gouvernement a estimé qu’entre 300 000 et 350 000 personnes sont impliquées dans l’extraction artisanale et à petite échelle de l’or, alors qu’on estime que la survie de cinq à sept millions de personnes dépend du secteur de l’extraction. Toutefois, sur la base des consultations et des données collectées dans les bureaux gouvernementaux de la région, on estime que le nombre d’exploitants d’or et d’opale artisanaux et à petite échelle, rien que dans les plus grandes zones de production, s’élève à environ 1,26 millions de personnes.
2. La majorité des activités du secteur artisanal (production et commercialisation) est informelle : Environ 94 % des exploitants artisanaux à petite échelle ne disposent pas de licence, ce qui pénalise la minorité qui détient les licences du fait que cela restreint leur zone d’activité. Cela encourage les exploitants à petite échelle titulaires de licences à passer à des activités informelles, voire dans certains cas illégales. L’étude fait également état des processus de commercialisation légaux et illégaux, et estime que plus de 60 % de la production totale est commercialisée par des agents informels.
3. Manque de supervision et mauvaise gestion des zones sous licence : La surveillance des zones sous licence d’exploitants artisanaux à petite échelle a été limitée et, dans certaines zones, les exploitants privés sur grande échelle ont officiellement reçus les mêmes sites que les exploitants artisanaux. Dans certains cas, cela a porté à des conflits entre les exploitants artisanaux et ceux sur grande échelle en raison du chevauchement des activités.
4. Lacunes dans le cadre juridique et besoin important d’améliorer l’application des réglementations liées à l’ASM : L’étude souligne les défauts dans les lois existantes liées au secteur et appelle à revoir les lois et à améliorer leur application. Il semblerait que le gouvernement présente quelques lacunes en matières de suivi et de supervision, en particulier en ce qui concerne les zones sous licence.
5. Potentiel important pour le gouvernement d’améliorer sa part de redevances de la production de l'activité artisanale: Sur la base des estimations de production et des redevances réellement collectées, le rapportage ITIE indique que seulement 36 % des redevances potentielles ont été collectées en 2014. L’étude montre comment les taux de redevances varient de régions en régions et indique que les données manquantes sur la production réelle des exploitants légaux et informels font qu’il est extrêmement difficile pour le gouvernement de savoir combien aurait pu être collecté en redevances.
6. Manque d’informations consistantes sur les prix : Cela est particulièrement vrai pour les matières premières qui ne sont pas commercialisées par la Banque nationale (telles que l’opale et la tantale) et pénalise énormément les exploitants vis-à-vis des acheteurs.
Quel enseignement les autres pays peuvent-ils tirer ?
L’étude suggère les mesures ci-après afin d’inclure le secteur artisanal dans le périmètre d’application du rapportage de l’ITIE, ce qui pourrait être important pour d’autres pays mettant en œuvre l’ITIE :
Bien que l’étude sur le secteur artisanal fournisse un aperçu plus complet du secteur par rapport à ce qui était disponible auparavant, elle démontre également les défis liés à la collecte des données sur le secteur et les lacunes importantes en matière d’informations. Peu d’informations sont accessibles publiquement par les personnes impliquées dans le secteur, la tenue des registres fait défaut et la qualité des informations existantes est douteuse en raison du fait qu’elles se basent sur des estimations. Néanmoins, les premières expériences de rapportage sur les activités artisanales peuvent contribuer à cartographier les défis clés et les mesures à mettre en place pour le gouvernement comme pour les parties prenantes dans le processus de l’ITIE.
Lire l’étude ITIE de l’Éthiopie « Opération d’extraction artisanale et ses valeurs économiques, Éthiopie » : https://eiti.org/fr/node/7429
En collaboration avec la Banque mondiale, l’ITIE a développé une note d’orientation pour les pays mettant en œuvre l’ITIE sur l’inclusion du secteur artisanal dans le rapportage ITIE : https://eiti.org/GN21