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Les tendances en matière de transparence : bilan des divulgations sur la propriété effective dans les pays mettant en œuvre l’ITIE

Les données de propriété effective réduisent la corruption dans le secteur extractif en identifiant conflits d’intérêts et pratiques corrompues.

Il est essentiel de révéler l’identité des propriétaires réels des entreprises extractives, appelés les « bénéficiaires effectifs », mais cela implique également certains défis. Souvent, l’anonymat de ces propriétaires est préservé, dissimulé derrière une série d’entreprises anonymes. L’opacité de la propriété des entreprises pose des risques de corruption et de conflits d’intérêts, particulièrement dans les industries extractives, où les profits sont élevés et où la transparence est donc fondamentale.  

Récemment, l’ITIE a dressé un bilan pour évaluer les progrès réalisés en matière de transparence de la propriété effective dans l’ensemble de ses 56 pays de mise en œuvre. L’examen se focalisait sur les aspects qui sont essentiels à la mise en œuvre des Exigences de la Norme 2023 de l’ITIE consacrées à la propriété effective, notamment les cadres juridiques, les définitions, les obligations en termes de déclaration des personnes politiquement exposées (PPE), les divulgations, les registres publics et l’exhaustivité. Ici, nous en présentons les principales conclusions et mettons en avant les innovations observées dans un éventail de pays. 

Principales conclusions du bilan 

Le bilan révèle que des progrès notables ont été accomplis dans l’établissement de cadres juridiques pour la propriété effective et dans la définition de seuils pour la déclaration de l’identité des bénéficiaires effectifs. Les aspects qui ont présenté davantage de problèmes portent sur les obligations en termes de déclaration des PPE et sur l’élaboration de registres publics complets et fiables. Les principaux points à retenir sont les suivants : 

  • Cadres juridiques : au moins 33 (60 %) pays de l’ITIE ont mis en place des cadres juridiques pour la propriété effective, et 13 autres (23 %) élaborent actuellement des projets de cadres. L’établissement du fondement juridique pour les divulgations est une étape essentielle de la création de systèmes destinés à collecter les données et à en assurer l’accessibilité, et cela nécessite de faire des compromis entre une multitude d’aspects, en plus de ceux liés à la confidentialité des données. 

  • PPE : au moins 44 (80 %) pays ont officiellement défini ce qu’est une PPE, mais seulement 32 (60 %) incluent les PPE dans leurs cadres de divulgation. Divers pays tels que l’Arménie, le Ghana et la République kirghize exigent des PPE qu’elles divulguent leur propriété effective, quel que soit leur niveau de participation dans une entreprise. 

  • Seuils : 50 (90 %) pays ont défini des seuils de propriété pour leur déclaration, à savoir le niveau de propriété à partir duquel les exigences de déclaration s’appliquent. La moitié de ces pays ont établi leur seuil à 10 % ou moins, et 16 (moins de 30 %) autres ont défini des seuils à 25 % ou plus, notamment tous les pays membres de l’Espace économique européen. Face aux changements introduits dans la Norme 2023 de l’ITIE, l’ITIE Royaume-Uni a ajusté ses formulaires de déclaration sur la base d’un seuil de 10 %.  

  • Divulgation et registres publics : au moins 38 pays (67 %) divulguent des informations sur la propriété effective par le biais de leurs Rapports ITIE ou de plateformes en ligne, contre 31 en 2019. Plus de la moitié de ces pays tiennent à jour un registre central ou sectoriel, mais pas plus d’un tiers de ces registres sont accessibles au public. En 2019, seulement 13 % des pays mettant en œuvre l’ITIE avaient publié des registres accessibles en ligne.   

  • Exhaustivité : l’étendue et le détail des informations divulguées demeurent problématiques. Un grand nombre de pays manquent de données complètes ou de dispositifs de contrôle pour vérifier ces informations, ce qui compromet la fiabilité et l’utilité des données sur la propriété effective en tant qu’outil de contrôle des entreprises.

Faire avancer les choses 

Progrès et meilleures pratiques

Les progrès accomplis en matière de transparence de la propriété effective font l’objet d’un suivi dans le cadre de la Validation – le mécanisme d’assurance qualité de l’ITIE. Jusqu’ici, les divulgations de 25 pays sur la propriété effective ont été validées en fonction des critères complets des Exigences de la Norme 2019 de l’ITIE. La Validation du niveau de respect des Exigences prévues dans la Norme 2023 de l’ITIE démarrera en janvier 2025.  

  • Un pays (l’Arménie) a dépassé les Exigences de la Norme 2019 de l’ITIE.  

  • Quatre pays (le Ghana, la Mongolie, le Nigeria et Trinité-et-Tobago) ont respecté en grande partie les Exigences contenues dans la Norme 2019 de l’ITIE.  

  • Vingt pays ont partiellement respecté les Exigences, ce qui indique que des améliorations sont possibles dans les cadres juridiques ainsi que dans l’exhaustivité et la fiabilité des données.  

 

UK GOV
En mars 2022, le gouvernement britannique a approuvé le Beneficial Ownership Data Standard pour la collecte, l'utilisation et la distribution des données sur les bénéficiaires effectifs.

Initiatives notables dans les pays  

Tandis que les pays s’apprêtent à mettre en œuvre des divulgations complexes, mais dont l’impact sur la propriété effective sera substantiel, certains exemples d’initiatives menées dans un éventail diversifié de pays mettant en œuvre l’ITIE ont abouti à des modèles utiles : 

  • Afrique anglophone : le Ghana, le Liberia, le Nigeria et la Zambie ont été des pionniers en établissant des registres publics couvrant l’ensemble de leur économie dans la région. 

  • Asie et Europe : l’Arménie, l’Indonésie, la Mongolie et le Royaume-Uni ont également mis en place des registres couvrant l’ensemble de leur économie. L’ITIE Philippines et la Mongolie ont créé des plateformes de divulgation publique de l’identité des bénéficiaires effectifs dans le cadre de la déclaration ITIE. 

  • Afrique francophone : le Togo a adopté un décret portant divulgation de l’identité des bénéficiaires effectifs dans le cadre d’un registre central. La Côte d’Ivoire et la République démocratique du Congo (RDC) ont établi des projets pilotes pour les industries extractives par le biais du processus de l’ITIE, bien que le registre de la RDC se limite aux entreprises dont les revenus sont significatifs. Le Sénégal a déclaré qu’il permettra au public d’accéder à ses informations sur la propriété effective des entreprises extractives. 

  • Amérique latine : la Colombie a adopté une législation visant à renforcer son cadre de collecte des informations sur la propriété effective, par le biais de l’autorité fiscale. Trinité-et-Tobago a établi un projet pilote dans le cadre de la déclaration ITIE.  

Nombre de ces innovations ont bénéficié d’un appui par le biais d’une assistance technique et d’orientations fournies dans le cadre du programme Opening Extractives, mis en œuvre conjointement avec Open Ownership. 

Établissement de liens avec les registres des licences  

La Norme 2023 de l’ITIE encourage l’établissement de liens entre les registres des licences et les plateformes de données sur la propriété effective. Bien que peu de juridictions relient activement ces informations, la prochaine phase du programme Opening Extractives soutiendra des pays tels que la Colombie, le Ghana, l’Indonésie, les Philippines et la Zambie dans l’utilisation des données sur la propriété effective pour le contrôle des licences. 

Stakeholders from Colombia, Ghana, Indonesia and Zambia gathered in Oslo, Norway, in November 2023 to exchange good practices on implementing the Opening Extractives programme
Des parties prenantes de Colombie, du Ghana, d'Indonésie et de Zambie se sont réunies à Oslo, en Norvège, en novembre 2023 pour échanger des bonnes pratiques sur l'intégration de l'utilisation des informations sur les bénéficiaires effectifs dans les processus d'octroi de licences.

Prochaines étapes et priorités  

À l’échelle mondiale, plus de 120 pays sont engagés en faveur de réformes relativement à la propriété effective. Cela dit, il demeure difficile de concrétiser cet engagement.  

Le bilan a montré que les aspects nécessitant le plus grand appui comprennent le renforcement des cadres juridiques et politiques, l’établissement de registres contenant des données exhaustives, de qualité et fiables, et l’apport d’un soutien dans la mise en œuvre des nouvelles dispositions de la Norme 2023 de l’ITIE.  

Les subventions et appuis ciblés, notamment de la part de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID), de la Fondation BHP et de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), sont mises à profit en soutien à des divulgations de qualité et à l’utilisation des données, par le biais d’une coordination interagences, d’une assistance technique, d’échanges entre pairs, de documents politiques et d’orientations concernant la législation et l’utilisation des données sur la propriété effective aux fins du contrôle des licences.  

Il est essentiel de publier les informations sur la propriété effective pour fermer la porte à la corruption, faciliter une imposition efficace, promouvoir des marchés plus équitables, encourager des investissements responsables et gérer les risques opérationnels. Avec l’accélération de la transition énergétique, la poursuite de la résolution de ces questions sera primordiale. 

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Shutterstock